Ceci n'est pas un fétiche :

Bambara

 

 

Statue d'ancêtre BAMBARA (ou BAMANA), Mali

Bois, métal

Patine sombre

h : 57,5 cm

Récoltée par Michel Mazoyer

Collection particulière

sculpture bambara 1

Les unités familiales apparentées constituent un segment de patrilignage localisé, ensemble d'hommes descendant d'un même ancêtre et formant l'armature sociale d'un quartier du village. Cette entité patrilinéaire et exogame joue le rôle d'unité de gestion des affaires matrimoniales et de contrôle de la richesse commune. Par ce double rapport au terroir et aux épouses, chacun reçoit son identité et son statut d'une référence aux ancêtres.

 

Le "village" (dugu ), qu'il soit d'un seul bloc ou éparpillé en des quartiers séparés par des champs, regroupe plusieurs patrilignages entre lesquels s'instaure une hiérarchie en fonction de l'ancienneté d'installation. L'aîné du lignage fondateur a la responsabilité des cultes annuels qui, en répétant symboliquement l'alliance avec le sol assurent la prospérité générale. Le quartier des maîtres du sol est fréquemment appelé banmana, comme si l'on était d'autant plus bambara qu'on est enraciné dans un terroir.

 

Cette sculpture, représentation d'ancêtre, a donc un rôle fondamentale dans la société bamana. Elle symbolise l'origine de la famille, du lignage, du village ; en ce sens, elle est garante de la cohésion sociale et de ses hiérarchies.

 

Maternité BAMBARA (ou BAMANA), Mali

région de Ségou

Bois, trace de patine noire lavée.

h = 53,5 cm

Collection particulière

Dans cette maternité assise, la mère est sculptée de façon frontale, hiératique, dans l'immobilité sacrée requise.

L'enfant n'est pas un enfant réel, mais une représentation symbolique, illustrant les mythes. Il ne s'agit pas d'ailleurs d'un nourrisson, mais de la représentation en réduction d'un adulte comme dans les figurations anciennes de Madone où l'enfant jésus était souvent représenté sous les traits d'un adulte. De la même manière, la mère n'est pas une mère du monde terrestre, faite de chair et de sang, mais une " vieille mère ", ancêtre mythique.

Toutefois, si cette maternité ne cherchent pas à exprimer des sentiments, néanmoins la relation entre les deux personnages est soulignée avec force par l'importance que le sculpteur donne aux mains maternelles. Elles sont disproportionnées, saisissant fortement l'enfant.

Ainsi, l'enfant forme avec sa mère un groupe qui, au-delà de l'expression d'une mère allaitant son enfant, se réfère à la fécondité et porte une symbolique sacrée.

 

Statue BAMBARA (ou BAMANA), Mali

Bois, patine noire lavée.

h = 65 cm

Récoltée par Michel Mozoyer.

Collection particulière.

sculpture bambara 3

Dans le sud du pays bamana, l'association dyo accueille les hommes et les femmes mais l'initiation est plus courte et moins dure pour ces dernières ; celle des hommes dure sept ans et aboutit à leur mort et à leur renaissance symbolique. Elle se termine par de grandes fêtes masquées auxquelles participent les nouveaux initiés qui vont de village en village.

Dans les fêtes de dyo et le rituel du gwan lié à la fécondité, on exhibe des figures assises. Gardées toute l'année sur les autels, elles étaient nettoyées, huilées, décorées de vêtements et de perles et disposées par groupe de deux ou de cinq. De style naturaliste, elles sont de plus grande dimension que la majorité des sculptures bamana connues jusque-là. Cette sculpture appartient au rituel du gwan. Le corps est massif, sculpté dans le rond, les épaules larges, les seins, coniques, projettés en avant, les traits du visage traités avec douceur et souci du détail. Cette statue illustrent les qualités que devront avoir les futures initiées : beauté, savoir, pouvoir. Chaque figure est "expliquée" aux initiés et véhicule la force vitale qui contribue à la cohésion du village. Les Bamana croient en l'existence de forces spirituelles que mettent en action des individus capables de créer une atmosphère d'harmonie, de prospérité et de bien-être.

Ici, il s'agit, d'une sculpture d'offrande liée au culte de la fécondité. La Statue, attaquée par les termites, représente une femme assise sur ses genoux (position traditionnelle) portant une urne ; elle symbolise une ancêtre particulièrement féconde mais encore jeune fille.

 

Masque Antilope BAMBARA (ou BAMANA), Mali

Bois, patine polychrome

h = 69 cm

Récoltée par Michel Mozoyer

Collection particulière

masque bambara 4

Le Bambara est, dans ces terres imprégnées d'islam, l'infidèle par excellence. Le nom de Bambara signifierait en arabe, homme sans dieux. C'est qu'il ne s'agit pas tant de s'adresser à des dieux que d'agir sur les forces cachées du monde. Pour cela, les Bamana utilisent des objets symboliques dont les plus puissants, sont sous le contrôle de "sociétés" : Komo, Nama, Korè, Dyo, Wara, Nya... qui tenaient une place importante dans la vie du village.

C'est de ces sociétés que proviennent les masques à figuration animale qui, avec les statuettes utilisées dans certaines régions pour le culte des ancêtres, constituent la plus grande part des "objets bambara". Ce masque en forme d'antilope hippotrague a été fabriqué par les Numu ou forgerons, groupe casté auquel est reconnu un pouvoir de médiation avec le sacré et qui est chargé aussi de la circoncision et de l'excision, du traitement des cadavres, des purifications nécessaires à la suite de ruptures d'interdits. L'association komo, dirigée par les forgerons, possède ce masque, porté seulement par les forgerons et caractérisé par une grande bouche et des cornes d'antilope ; sa force est telle, dit-on, qu'il peut tuer un adversaire.

Le forgeron est, tout d'abord, l'artisan qui fabrique l'outillage en fer (haches, herminettes, couteaux, etc.) ou l'armement (lances, poignards, etc.) dont a besoin ce peuple. Mais il est aussi le seul habilité à sculpter les images des ancêtres et des génies. Enfin il a un rôle social : il est souvent appelé à jouer un rôle de de médiateur : entre les membres de la société, mais aussi entre le monde des morts et celui des vivants. Le forgeron vit à l'écart du village avec son épouse, la potière, et il est l'objet d'attitudes ambiguës (admiration et crainte).

 

Masque zoomorphe BAMBARA (ou BAMANA), Mali

Bois, patine sombre et plaque de laiton

h = 37 cm

Collection particulière

masque bambara 5

Le masque en Afrique noire représente, avec la statuaire, un élément important de la création plastique. L'un et l'autre se situent au cœur de la vie socio-religieuse traditionnelle. L'objectif premier de la sculpture africaine n'est pas, de représenter le monde visible mais de rendre sensibles des réalités d'ordre moral ou surnaturel, c'est un art abstrait par définition.

Une des meilleures définitions du masque africain est sans doute celle de W. Fagg : "Tous les objets auxquels le nom de "masque" doit être attribué peuvent se définir en deux mots : ils masquent. Cela signifie qu'ils cachent ou suppriment l'identité". Ils masquent celui qui les porte afin de l'aider à personnifier une force errante, en la charmant par sa propre image pour mieux la capter et la manœuvrer. La partie sculptée, la plus travaillée, n'est qu'un élément du masque, qui consiste en un costume complet qui est exhibé au cours de cérémonies qui sont des mises en scène des grands problèmes existentiels élaborés à travers des mythologies spécifiques : lutte entre le bon et le mauvais, mythes des origines, problèmes de la mort. Ces manifestations ont lieu aux moments cruciaux de la vie sociale, en réponse à tout ce qui constitue un défi à la cohésion et à la survie du groupe, en particulier la maladie et la mort.

Les masques, indissolublement associés au savoir et au pouvoir, sont entourés du secret et sont en principe l'apanage des hommes. Les sociétés initiatiques dont ils procèdent sont des institutions qui dispensent, dans un contexte ritualisé, la connaissance des lois sociales. Ces confréries initiatiques tenaient une place importante dans la vie publique villageoise : règlement des conflits, répression des délits, traitement des accusations de sorcellerie. Ce masques zoomorphe (cornu) mais presque humain provient d'une de ces "sociétés" et est un masque du Ntomo. Très stylisé, il est recouvert de feuilles de laiton