Ceci n'est pas un fétiche :

Dogon

 

Femme porteuse d'une cruche, DOGON (Mali).

Bois, patine rituelle sombre et usure d'usage

h = 60 cm

Récoltée par Michel Mozoyer

Collection particulière

sculpture dogon 1

La sculpture dogon est avant tout rituelle. Les statues servent de support à l'initiation et à l'explication du monde. Conservées dans des sanctuaires familiaux, elles représentent des ancêtres ou des êtres mythiques et présentent une diversité remarquable de formes. Ici, l'ancêtre féminin est traité de façon réaliste, sans rigidité, le visage témoignant de la pensée.

Dans la culture dogon, les statuettes sont souvent utilisées au cours de cérémonials de guérison. Elles identifient la personne qui les offre, signalent son problème et attirent l'attention. Cette représentations d'une femme agenouillée, dans la position traditionnelle, le ventre arrondi, les seins pointés en avant, est caractéristique de l'art Dogon ; elles devait favoriser la fécondité ou le bon déroulement de la grossesse.

Liée au culte de la fécondité, elle incarnent la première ancêtre morte en couches et était l'objet d'offrandes de nourriture et de sacrifices de la part des femmes qui attendent un enfant, offrandes et sacrifices qu'on déposait sur le plateau situé au dessus du vase.

Cette statuette en bois, œuvre des forgerons, semble avoir beaucoup servie (patine rituelle et usure d'usage).

 

Statue d'ancêtre DOGON (Mali)

Bois Trace de patine sombre

h = 79 cm

Collection particulière

sculpture dogon 2

Comprenant plusieurs clans totémiques, le village dogon est sous l'autorité du conseil des anciens. A la tête d'une région, le hogon est le chef, responsable du culte du lébé, le serpent mythique. C'est ce serpent qui est symbolisé dans le dos de cette sculpture. Les clans se subdivisent en lignages, ginna (famille étendue qui se compose de tous les descendants, par les hommes, d'un même ancêtre), dirigés par le patriarche, gardien de l'autel des ancêtres. Chaque ginna possède collectivement un ensemble de maisons et de champs dont la propriété est inaliénable. Ces biens sont gérés par l'homme le plus âgé qui habite la grande maison, symbole de la lignée.

Les statuettes conservées dans la grande maison ou dans des sanctuaires familiaux représentent des ancêtres ou des êtres mythiques.Les sculptures dogon peuvent commémorer des événements accomplis à l'origine de la création, au début du monde, elle racontent alors la génèse ; certaines peuvent rappeler des événements ou des actions légendaires accomplis après la création ; d'autres enfin représente les ancêtres d'un clan ou d'un village.

La mythologie explique donc, outre l'origine du monde, le fondement des coutumes. Mais il apparaît que le mythe est, lui-même, symbole de convictions plus profondes. Ainsi la dualité mâle-femelle, nécessaire à la vie, est source de conflit jusqu'au cœur même de chaque individu. C'est pourquoi un garçon ne devient pleinement homme qu'à la circoncision, qui le débarrasse de son principe féminin. Cette sculture est une représentation hermaphrodite de l'ancêtre (un labret et des seins). L'opposition, est elle aussi complémentaire. Il n'y a donc pas de position absolue, mais rupture d'un équilibre, ou violation, volontaire ou non, d'un interdit, qu'un rituel approprié compensera ; ce rituel est souligné par la coiffure traditionnelle.

 

Couple primordial DOGON (Mali)

Bois, patine bière et bouillie de mil

h = 84 cm

Récoltée par Michel Mozoyer

Collection particulière.

sculpture dogon 3

Les sculptures dogon servent de support à l'initiation et à l'explication du monde.Des associations masculines et féminines sont chargées de l'initiation qui a lieu par classe d'âge ou tonno. L'initiation commence , par l'enseignement des mythes commentés par des dessins, des peintures et des sculptures. Le jeune garçon et le jeune fille y apprendront la place de l'homme dans la nature, la société et l'univers. Ce n'est pas une initiation simple car la mythologie dogon est si complexe qu'un griot a besoin d'une semaine pour la réciter en son entier.

De nombreuses statuettes dogon racontent la génèse : Amma, dieu suprême qui n'est jamais représenté, créa la terre et en fit son épouse. Une termitière, clitoris de la terre, se dressa en rivale du sexe mâle, et Amma dut l'abattre. La terre excisée fut plus docile à son époux et mit au monde le Nommo, à la fois mâle et femelle, couple idéal, maître de l'eau et de la parole. Puis, Amma façonna avec de l'argile un couple humain : Dyougou Serou (le premier être) et sa soeur. A la suite d'un inceste (le couple primordial incestueux de Dyougou Serou et de sa sœur n'est pas sans reppeler le couple d'Osiris et d'Isis chez les egyptiens), ce couple donne naissance aux huit ancêtres et trouble ainsi l'ordre rétabli, ensuite, par les huit Mommo (les bras levés), le sacrifice de deux de ces Mommo aux fins de purifier le champ primordial afin de permettre l'arrivée sur terre du forgeron-cavalier avec l'arche porteuse des techniques, des graines, des ancêtres et des animaux. Dans cette perspective, cette sculpture à deux faces symboliserait le couple primordial, sorte d'Imago mundi.

 

 

Masque Satimbé DOGON, (Mali)

~ 1940-1950

Masque complet avec sa jupe et son mors.

Traces d'utilisations rituelles

Bois, fibres rouges, vertes et brunes, tissu (jupe)

Patine rituelle (sang, bouillie et bière de mil)

h : avec la jupe, 64 cm ; sans la jupe, 43 cm.

Récoltée par F. et N. Faure dans les années 80 à Yabatalou, falaise sud, près de Ende, Mali.

Collection particulière.

masque dogon 4

Dans la culture dogon, entre les masques et les statuettes, il existe des masques-statue. Ce masque Satimbe est un masque "dont la tête est surmonté d'une statuette féminine, ce qui à Touyogou, village proche de Sanga, lui vaut le nom de sadège dans lequel la présence du mot dege, "statuette", montre qu'il est reconnu comme comportant une figuration expressément sculpturale" (Michel Leiris). Cette statuette surmontant le masque, represente la première Yasigine (litt. soeur des masques), seule femme admise dans la société des masques. Dans les mythes Dogon, la Yasigine est la femme qui a découvert la fibre (le tissage et la teinture, c'est-à-dire, la culture) et s'est confectionnée une robe rouge. Mais le tissu, la trame, l'entrecroisement des questions et des réponses, c'est, justement, étymologiquement le texte. Dès lors, on peut se demander si la Yasigine n'est pas plus que la première femme, si elle n'est pas le symbole qui représente le début de l'humanité, le trimphe sur l'animalité naturelle ? En ce sens la Yasigine n'est pas sans reppeler les Sphinx de l'ancienne Egypte où, comme le ramarque Hegel, une tête de femme s'arrache de la gange animale, léonine.

 

Masque DOGON, (Mali)

Traces d'utilisations rituelles

h : 43 cm

Bois

masque dogon 5

Le masque a pour fonction de réaffirmer, la vérité et la présence des mythes dans la vie quotidienne et d'assurer la vie collective. Les cérémonies où sortent les masques, sont des cosmogonies en acte qui régénèrent le temps et l'espace, tentant, par ce moyen, de soustraire l'homme et les valeurs dont il est dépositaire à la dégradation qui atteint toute chose dans le temps historique. Mais ce sont aussi de véritables spectacles cathartiques au cours desquels l'homme prend conscience de sa place dans l'univers, voit sa vie et sa mort inscrites dans un drame collectif qui leur donne un sens.

Se servir d'un support humain pour produire un être nouveau n'est pas sans danger pour l'homme masqué. Le masque figure des forces connues, répertoriées dans la nomenclature des génies et des ancêtres , mais il n'est pas, en lui-même, l'être qu'il représente,il n'est qu'une apparence destinée à tromper la force vitale qu'il doit piéger, toutefois, il doit aussi protéger celui qui le porte contre les effets des forces qu'il endosse provisoirement. En aucun cas, le danseur ne doit être reconnu. A cet effet, de multiples précautions sont prises pour que le masque ne se détache pas et que le corps même du danseur reste caché.

Le masque est destiné à protéger contre la possession, mais c'est en lui qu'est la force vitale et cela est si vrai que parfois, le phénomène de possession est directement causé par le masque ou la rupture d'un interdit le concernant, " par la vue ou le toucher d'une partie du costume de danse... par la proximité trop grande d'un danseur durant une cérémonie ou sa rencontre inopinée au cours d'un de ses déplacements dans le village " (M. Griaule). Le masque piège des forces spirituelles dont il faut empêcher l'errance, or, ces forces, à la suite d'un contact quelconque, peuvent envahir celui ou celle qui ne sont pas habilités à entretenir ce contact. Le porteur se prémunit à l'avance en taillant lui-même son masque et avant de revêtir son costume, il doit observer des interdits, se purifier ou effectuer un sacrifice.