Les DE ROMEZIN.
Seigneurs de Moulin Neuf, Ville, Sarzier, Mazeaux etc.
La présence de cette famille dans la liste des « occupants » de Marcoux, alors même que le séjour fut particulièrement bref (février 1638-fin 1639), s'explique par le lien « historique » fort qui existe entre Louise de Romezin et ce lieu où elle a sans doute reçu les visites du missionnaire jésuite Jean-François Régis. La tradition locale en a gardé le souvenir tout comme l'historiographie et l'hagiographie.
Les Romezin forment une vieille famille des environs du Chambon dont la généalogie remonte jusqu'à Pons de Romezin cité en 1094 et localisé à Romières près du Chambon. La suite des générations voit la famille devenir co-seigneur de Bonas (hommage dès 1281) puis seigneur de Montgiraud (hommage de 1328), à la fin du XIVe siècle ils ajoutent la co-seigneurie de Champclause. C'est vers la fin du XVe siècle que se forme la branche d'où sont issus les Romezin notaires au Chambon de père en fils.
En août 1518 on trouve Pierre (le père) et Antoine (le fils), comme notaires de la paroisse et mandement du Chambon, se reconnaissant "hommes liges justiciables de l'illustrissime duchesse de Berry" ; c'est Antoine qui semble s'être converti au protestantisme en 1559, une date assez précoce pour le Chambon (il aurait peut-être même entraîné dans la dissidence le curé du lieu). Il s'agirait donc de l'arrière-grand-père de Louise de Romezin, son grand-père étant Pierre Isaac Daniel qui a épousé Marie de Rivoire en 1579. En 1580, on retrouve un Claude de Romezin cité comme parent dans le testament de Jean Astier de Mercoux. Cité seul dans une transaction en 1588, Pierre se retrouve associé à son fils Louis Daniel, en 1617. En 1623, Romezin père et fils sont inscrits comme participant à une controverse théologique entre le pasteur du Chambon et un père capucin en mission. Pierre fut, en 1613, bailli du Chambon et habitait alors dans une grande maison en ville, le futur "manoir de Banne". Un Charles de Romezin est cité comme notaire royal au Chambon vers 1653.
Louis Daniel de Romezin, seigneur des Mazeaux, épouse Marguerite Isabeau de Cellier. Celle-ci est liée (fille ou nièce) à Pierre de Cellier capitaine de l'imposante forteresse de Bouzols pour le compte du duc de Bouillon, un des chefs du parti huguenot, au début du XVII siècle ; le domaine de Cellier se situe à l'ouest du Chambon. Louis Daniel fait son testament le 16 septembre 1637 et le 27 avril 1638 le collecteur des impôts donne à Etienne de la Franchière, le gendre, la quittance de la "taille" de Louis : ces deux dates encadrent sans doute celle de la mort du père de Louise. Celle-ci est souvent considérée comme étant l'enfant unique du couple, or un certain Jacques de Romezin (écuyer, conseiller auprès de la sénéchaussée de Nîmes) est présenté plus tard comme l'oncle de Louis de La Franchière dans une transaction au Chambon et un certain Louis, né vers 1627 et mort en 1687 (après avoir "reçu les saints sacrements"), lègue une partie de ses biens à Louise ! S'agit-il de frères de celle-ci ? Le fils de Jacques de Romezin, François, est prieur du Chambon en 1672, ce qui montre bien que la famille a eu tendance à revenir assez vite au catholicisme, Louise ne fut pas un cas isolé.
Louise épouse le catholique Etienne de la Franchière en février 1638, la dot comprend une somme de 600 livres en plus de la promesse d'hériter de biens des parents. Louise de Romezin vit au château de Marcoux où elle met au monde un fils en février 1639, elle y reste encore quelques temps après le décès précoce de son mari en juillet 1639. Sans doute y reçoit-elle les visites de Jean François Régis en 1640 qui l'amène à se convertir au catholicisme. Son mariage, en 1641, avec Annet de Banne de Boissy met fin à ce séjour. Elle vit alors à Montregard et y a 6 enfants, puis elle se retire au Chambon à partir de son second veuvage en 1665. Elle partage alors ses biens entre ses enfants : donation réciproque entre vifs avec son fils aîné Antoine qui lui assure le gîte et le bois de chauffage ainsi que 6 setiers de seigle pris sur le domaine de Cellier, le cadet Louis reçoit 3 000 livres, Annet et Jacques 1 500 livres chacun, Jeanne a 2 200 livres et Anna 1 600, elle donne aussi 1 200 livres à Louis de La Franchière. Après 1687, elle s'installe chez sa fille à Chazelet près de la Chapelle d'Aurec et rédige un testament faisant de celle-ci sa légataire pour tout ce qui lui reste en propre (d'où l'acharnement procédurier de son gendre, Claude de Chave, contre Louis de La Franchière en 1709, qui contraste avec l'accord amiable conclu avec les autres frères et surs de Banne).
Elle semble avoir été une "riche héritière" avec de nombreuses terres tenues de ses parents autour du Chambon : Cellier (voir Louis de La Franchière), Verne (idem), la Bâtie, Péaure et Sarzier (ce dernier domaine est formé d'un pré de 28 métanchées "à raison de 800 pas la métanchée", d'une terre de 6 séterées et 6 métanchées, d'une terre et bois de 17 séterées) ; elle a aussi hérité de sa tante Jeanne de Cellier, de son premier mari (un augment de dot de 1 500 livres garanti plus tard sur les revenus de terres du domaine des Ruches ainsi que 300 livres pour "bagues et joyaux"). Elle est morte en mars 1705 chez sa fille Jeanne à Chazelet et a sans doute été enterrée, conformément à ses volontés, au Chambon.